En Mongolie, Joël Rauzy exerce le métier de musher, conducteur de chiens de traîneau. Régulièrement, il organise des expéditions d’une dizaine de jours sur les lacs gelés, auxquelles participent essentiellement des Français
Chaque hiver, il parcourt les rivières et les lacs gelés en compagnie de ses trente-huit chiens. Joël Rauzy est musher : conducteur de chiens de traîneau. Il est le seul en Mongolie : cette activité n’appartient pas à la culture d’Asie centrale. Avec sa compagne Bahina et une petite équipe d’assistants mongols, il organise des expéditions d’une dizaine de jours, auxquelles participent essentiellement des Français. Nous avons suivi l’une d’elles sur le lac de Khusvul, une gigantesque étendue d’eau du nord de la Mongolie, prise par les glaces de décembre à mai. Une féérie de givre et de cristal, par – 25 degrés.
Il y a encore huit ans, Joël était basé en France, dans les Pyrénées, et organisait des raids aux quatre coins du monde. C’est lors d’une de ces expéditions qu’il a eu le coup de foudre pour la Mongolie. Il s’y est établi, séduit par les grands espaces. « Je me suis dit : il y a de la place, il faut tenter le coup ». Depuis, il s’est habitué à une vie spartiate, souvent sans eau courante et avec le minimum d’électricité. Tous les ans au milieu de l’hiver, il transporte ses trente-huit chiens de son camp de base près d’Ulan Bator à son autre camp, situé à la pointe sud du lac de Khusvul.
Joël entretient des rapports étonnants avec ses chiens. Quand Queenie, sa chienne de tête, n’obéit plus à ses ordres, il immobilise brusquement le traîneau pour aller lui mordre l’oreille et lui rappeler qui est le maître. La même Queenie qui le soir, à l’étape, vient lui réclamer des caresses. « Elle vient vers moi parce qu’elle sait qu’elle a bien bossé. Ceux qui ont glandé se planquent », explique le musher avec malice. Joël n’hésite pas à prodiguer lui-même à ses chiens éprouvés par une rude journée de course des massages et des séances de stretching.
Le soir, les voyageurs font étape chez l’habitant, ou dans un campement de yourtes. Ils doivent monter la tente et dormir à même le sol, quand il n’y a pas d’autre habitation aux alentours.
Parmi les trois Français inscrits au raid, il y a Sophie, chimiste à Paris. C’est la troisième fois qu’elle participe à une expédition en chiens de traîneau, et la première fois qu’elle vient en Mongolie. Parée pour les grands froids, elle s’est équipée de deux chapkas, d’un masque anti-froid « façon Hannibal le cannibale », d’énormes chaussures « qui lui font gagner au moins trois pointures ». Elle va apprendre très vite à connaître les six chiens qui composent son attelage. Des chiens, qui lorsqu’ils aboient au moment du départ « lui donnent de l’énergie ». Pour Sophie, cette expédition sur le lac gelé, à travers des paysages d’une beauté minimaliste, est aussi l’occasion de faire le vide… « Tu passes d’une vie en ville où tu es sollicité tout le temps, où ça n’arrête jamais, et tu te retrouves au milieu de nulle part, dans le calme, le silence… C’est ça que je viens chercher ! »
Reportages TF1 / Agence Capa
Xavier Luizet, Jérôme Lanteri & Thomas Bourva